jeudi 16 février 2012

L’indignation des fonctionnaires du CGRA Pourquoi les états européens ne peuvent-ils pas contrôler leurs migrations ?

Une analyse sérieuse de la capacité des États à contrôler les flux de migrants nécessite une revue des fondements théoriques expliquant, d’une part, les mécanismes migratoires et, d’autre part, les processus de constitution des politiques dans le cadre spécifique de l’Union Européenne. 
En premier lieu, nous aborderons les processus migratoires. En second lieu, nous défendrons l’argument selon lequel les États européens ne peuvent pas contrôler entièrement leurs flux de migrants en y expliquant les raisons.
L’approche utilisée dans ce travail s’inscrit dans la perspective néo-institutionnelle. L’acteur est ici considéré comme socialement compétent dans la mobilisation des ressources mises à sa disposition, afin d’accéder à des opportunités et réaliser des objectifs qu’il est en mesure de percevoir et de se fixer, malgré les contraintes institutionnelles qui s’exercent sur son action et ses perceptions (Giddens 2005).

Les processus migratoires

« Il n’y a plus de fantasme, mais seulement des programmes de vie, toujours modifiés à mesure qu’ils font, trahis à mesure qu’ils se creusent, comme des rives qui défilent ou des canaux qui se distribuent pour que coule un flux », disait Deleuze (Deleuze et Parnet 2008, 59). Les migrations internationales forment un prisme de situations très différentes, mais suivant des processus semblables. Nous aborderons la majorité d’entre eux, ensemble de mécanismes caractérisés dans les projets migratoires, les chaînes migratoires, les contextes structurels des états et la globalisation. Nous esquisserons l’impact des politiques de visa vis-à-vis de ces phénomènes.

Le projet migratoire

Selon Castles (2007), les migrants adaptent leurs comportements par rapport aux contextes dans lesquels ils vivent. Par exemple, un migrant qui souhaitait rentrer dans son pays d’origine après une période de travail peut décider de rester et de ramener sa famille. Il ne s’agit pas seulement d’une intention de migrer, mais d’un projet migratoire. Ce projet comprend toujours un ou plusieurs objectifs, définis par un individu ou une communauté (Massey 1999, 48). Ces objectifs peuvent varier en fonction du contexte du pays d’origine et de ses relations avec le pays d’installation. Par exemple, l’immigration coréenne aux États-Unis est plutôt une immigration d’entrepreneurs de classe moyenne disposant d’un capital financier (Alba et Nee 1997, 46). Bien que le contexte structurel du pays d’origine influence le projet migratoire, les projets individuels en son sein peuvent être très diversifiés. L’étude des situations des migrants algériens en séjour irrégulier en France révèle au moins quatre profils aux motivations distinctes, même s’ils soulignent tous les conditions politiques et économiques algériennes (Têtu 2008). Considérer la migration comme un projet qui puisse s’adapter permet de mieux saisir le rôle des politiques publiques sur les comportements qu’elles cherchent à transformer. Ces dernières n’interviennent que comme facteur facilitant ou entravant ce projet, mais ne déterminent pas ses objectifs. Ajoutons que le projet migratoire n’est pas uniquement fondé sur une logique économique. Ainsi, le cas de cette sénégalaise, enceinte, mariée religieusement avec un belge et qui, découvrant qu’il est marié civilement en Belgique et tarde à divorcer, m’explique qu’elle vient d’une famille riche mais préfère vivre ici, dans la précarité, plutôt que d’affronter la honte de l’exposition de son échec conjugal à sa famille (entretien privé).
diasporaenligne.net

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