lundi 16 juillet 2012

Union Africaine : les petites erreurs de la diplomatie gabonaise

Le face à face tant redouté entre Madame Dilami Zuma et Jean Ping a connu son épilogue. L’Afrique du Sud s’impose à l’arraché, piétinant au passage quelques principes sacro-saints de l’organisation continentale. Les erreurs de la diplomatie gabonaise ont joué un rôle clé dans ce scrutin.

Les chefs d’Etats et de gouvernement de l’Union Africaine se sont prononcé au terme de quatre (4) tours de scrutin au cours en faveur Candidate Sud Africaine Dilami Zuma. Président sortant, Jean Ping qui a été éliminé dès le troisième tour du scrutin. La candidate sud-africaine s’est donc présentée seule au quatrième tour pour obtenir les 2/3 requis. La sagesse africaine a prévalu. En janvier dernier, Jean Ping s’était retrouvé seul au quatrième tour mais le boc des Etats de la SADC avait exercé une minorité de blocage empêchant la reconduction du Gabonais.

Madame Zuma a recueilli à l’issue du dernier round 37 voix contre 14 sur les 51 Etats votants car 3 sont sous le coup des sanctions à savoir le Mali, la Guinée Bissau et Madagascar. ; Il sied de noter dès le premier tour Madame Zuma a devancé Jean Ping en obtenant 27 voix pour contre 24. Au second tour, elle a creusé l’écart en obtenant 29 voix contre 22 voix pour Jean Ping. Au troisième tour, elle a obtenu 33 voix contre 18 pour Jean Ping ; c’est à l’issu de ce troisième tour que Jean Ping a été éliminé de la course.

Au regard de tout ce qui précède, force est de remarquer que le pire à certes été évité mais l’Afrique sort à notre avis divisée et plus ou moins affaibli ; car les principes du panafricanisme qui ont toujours fais la fierté du continent à savoir le consensus et le compromis ont été battu en brèche durant cette bataille entre les différentes régions du continent. Cette bataille a fait émerger plusieurs courants avec d’un côté le bloc Francophone qui s’est fissuré. Comment ne le serait-il pas d’ailleurs sans idéologie propre, avec comme seule référence le partage d’une commune ancienne puissance coloniale ? De l’autre, il y a le bloc Anglophone qui a fait bloc au fur et à mesure en faveur de l’Afrique du sud et qui se présente en fait comme le bloc de l’émancipation africaine.

Cette bataille rangée a certes connu un dénouement en faveur de la candidate sud Africaine qui a bénéficié du soutien total de son pays. Le président Jacob Zuma a mis les bouchées doubles pour ratisser large en faveur du soutient de sa candidate. Il faut le dire, le Rimbow Country n’a pas lésiné sur les moyens. Toutes les formes de pressions diplomatiques ont été mises en œuvre par l’Afrique du Sud qui a profité de la faiblesse du bloc de l’Afrique Centrale et qui a enregistré plusieurs ralliements en faveur de la candidate Sud Africaine. A commencé par le Tchad, la Guinée Equatoriale et la RDC.

Du côté de la zone Cédéao qui avait pourtant fait bloc autour de la candidature de Ping, l’armature n’a pas non plus résisté aux pressions sud-africaines. Dans la zone de l’Afrique de l’Est, on a vu avec surprise le Kenya céder à son tour aux sirènes du pays de Nelson Mandela alors que le colistier de Jean Ping était pourtant Kenyan. L’Afrique du Nord a voté pour l’ex femme de Zuma sans état d’âmes.

Les Raisons de la défaite de Ping.

Le candidat du Gabon qui en 2007 était le candidat de la région de l’Afrique Centrale n’a pas été présenté à la région par le président Ali Bongo comme ce fut le cas en 2007: Lors du dernier sommet de la Ceeac à Ndjamena, le Président Ali Bongo s’était fait représenté par le président du conseil économique et social du Gabon à un sommet des chefs d’Etat.. Un changement de style peut–être des us et coutumes du Palais au bord de la mer. Jamais de son temps, feu Omar Bongo qui savait manager les subtilités de ses pairs de la sous région, ne se serait permis une telle liberté.

Aussi, malgré le communiqué final annonçant le soutien de la candidature de la région en faveur de Jean Ping, certains chefs d’Etat comme le président Idriss Debby n’ont pas digéré cette manière diplomatique propre au Gabon; Puis entre le sommet de janvier et celui de juillet, le Gabon a changé de ministre des Affaires Etrangères. De plus, le président Ali Bongo n’a pas beaucoup fait bouger sa diplomatie pourtant efficace pour venir au secours de Jean Ping, auréolé d’un bilan plus qu’honorable à la tête de l’institution panafricaine.

Bref, la diplomatie gabonaise a commis des erreurs d’appréciations stratégiques à un moment crucial, misant aveuglement sur un compromis et le retrait de la candidature de Madame Zuma par l’Afrique du Sud ; De son côté, Jean Ping a trop misé sur les relations personnelles qu’il avait tissé avec certains chefs. Reste à savoir si l’Afrique a gagné une victoire ou enregistré une défaite dans cette chaude et froide nuit de dimanche à lundi.


Rodrigue Fénelon MASSALA Envoyé spécial