lundi 25 juin 2012

Comment nourrir dix milliards d'humains ?


Deux siècles après l'Europe, l'Asie et l'Afrique ont entamé leur « transition démographique ». D'abord, la mortalité, notamment infantile, recule, et la population augmente. Puis, les femmes procréent moins. Et l'équilibre revient. Cette stabilité retrouvée, les démographes la prévoient autour de 2100, à l'échelle de la planète. Mais, d'ici là, le nombre des humains va continuer de croître. 

En 1800, la Terre ne supportait qu'un milliard d'habitants. Après, la démographie s'est emballée : 2 milliards vers 1920, 6 milliards en 2000, 7 milliards l'an dernier... Le scénario « moyen » de l'Onu promet 9 milliards en 2050 et 10 milliards en 2100. La transition démographique sera alors achevée partout.

« Le taux de fécondité devrait converger partout vers deux enfants par femme », estime Gilles Pison, chercheur à l'Institut national d'études démographiques (Ined). Indicateur de cette tendance : le taux de croissance de la population a atteint son pic dans les années 1960. Depuis, il diminue (1 % par an actuellement). « L'humanité ne comptera pas des dizaines ou des centaines de milliards d'habitants », assure le chercheur.

Apprendre à partager

Les accidents restent possibles : épidémies, guerre, famines, catastrophes.... Ils peuvent coûter des centaines de milliers, voire des millions de vies. Mais il en faudrait beaucoup pour que la trajectoire soit sérieusement déviée. « Peu crédible », estime Henri Leridon, autre chercheur de l'Ined.

Le plus prudent est donc de se préparer à vivre avec 10 milliards de congénères. Il faudra apprendre à partager la soupe. Près d'un milliard d'humains ne mangent toujours pas à leur faim. Pour assurer les 3 000 kilocalories (kcal) par jour nécessaires aux 9 milliards attendus en 2050, il faudra 70 % d'aliments de plus qu'aujourd'hui. Colossal, mais pas hors de portée, assure Henri Leridon qui a fait l'inventaire des garde-manger potentiels. Les agronomes jugent possible d'étendre de 10 % les surfaces cultivées, d'accroître de 50 % les rendements. Gains possibles aussi sur le gaspillage qui, entre le champ et l'assiette, évapore jusqu'à 50 % de la production.

Il faudra aussi changer nos habitudes. Un quart de la population est en surpoids. Les pays riches mangent trop de viande. Or, il faut 8 calories végétales pour produire une calorie de steak. « Il n'est pas nécessaire d'en manger à tous les repas », rappelle Henri Leridon. La révolution alimentaire sera d'abord culturelle. Mais « si on a résolu le problème en 2050, il sera définitivement résolu », pense le démographe.



Serge POIROT.