samedi 14 janvier 2012

CAS HISSENE HABRE : La responsabilité africaine interpellée

Dans ce qu’il est convenu d’appeler le dossier d’Hissène Habré, la justice sénégalaise vient, une nouvelle fois, de rendre un avis qui n’est pas du goût des victimes du règne dictatorial de l’ancien chef d’Etat tchadien. Invoquant des vices de forme, la Cour d’appel de Dakar vient de rejeter ce mercredi la demande d’extradition qui avait été formulée par la justice belge. Du coup, pour les victimes, ce sont les derniers maigres espoirs qui s’envolent. Pour elles, la perspective d’une justice s’éloigne de nouveau. Mais cette situation ne grandit ni le régime sénégalais, dont les incessantes volte-face semblent répondre à une volonté de jouer avec les nerfs des victimes; ni les institutions panafricaines dont le mollesse et le caractère timoré dans ce dossier tendent à légitimer l’interventionnisme aussi de l’occident que de la CPI dans les crises africaines.

Pourtant, récemment encore, au micro de nos confrères de RFI, le président sénégalais avait laissé entendre qu’il pourrait laisser extrader l’ancien président tchadien en Belgique.

Pour les victimes et leurs avocats, le verdict de la cour d’Appel de Dakar de ce mercredi est un démenti cinglant à un optimisme qui commençait à prendre forme. Avec ce dernier retournement de veste, on a de plus en plus l’impression que les autorités sénégalaises se servent du cas d’Hissène Habré comme un moyen de chantage. Il faut rappeler que cela a, tout d’abord commencé par un budget du procès au Sénégal, qui avait été outrancièrement gonflé. Maintenant, on souffle le chaud et le froid, en annonçant une chose aujourd’hui et son contraire, demain. A ce rythme, l’ambiguïté du Sénégal ne tardera pas à être démasquée.


Mais plus que le Sénégal, ce dossier interpelle d’abord et avant tout le continent africain et l’ensemble de ses institutions et de son élite politique. En effet, en Afrique, il n’est pas rare d’entendre parmi les responsables et les intellectuels des voix qui se désolent de l’attitude impérialiste de l’occident et partiale d’institutions judiciaires internationales, à l’image de la CPI. Or, le retard enregistré et que continue d’enregistrer ce dossier est symptomatique, hélas de l’incapacité du continent africain à poursuivre ses propres criminels. Cela fait plus de 20 ans que les victimes courent après la justice et la réparation.


Entre temps, Charles Taylor, Jean-Pierre Bemba et plus récemment encore Laurent Gbagbo, entre autres, sont traduits par la justice internationale. Dans un tel contexte, on aura du mal à convaincre les justiciables africains à se détourner des instances internationales.

Défendre la souveraineté africaine, ce n’est pas qu’un discours. Il faut également poser des actes. Ce qui, pour le moment, n’est pas le cas.

Boubacar Sanso Barry pour GuineeConakry.info

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