vendredi 2 décembre 2011

La fuite coûteuse des médecins africains

L’exode des médecins formés en Afrique et qui partent en Europe, en Australie et en Amérique du Nord représente une perte sèche de plusieurs milliards de dollars pour le continent. Et autant de bénéfice pour les pays de destination.

Il y a des fuites qui coûtent cher, très cher, la fuite des cerveaux par exemple. Et le continent africain en sait quelque chose. La revue médicale britannique British Medical Journal, le BMJ, publie en effet, dans son numéro du 24 novembre 2011, une étude sur le coût financier représenté par l’émigration de médecins de neuf pays d’Afrique sub-saharienne vers l’Europe, l’Australie et l’Amérique du Nord.

L'étude concerne l’Ethiopie, le Kenya, le Nigeria, le Malawi, la Zambie, le Zimbabwe, l’Ouganda, la Tanzanie et l’Afrique du Sud. Les critères ayant conduit à ce choix sont divers. Il fallait qu’il y ait au moins une faculté de médecine dans chacun des pays. L’infection par le virus VIH devait concerner 5% au moins de la population ou un million de personnes et plus. Le dernier critère était de disposer des données sur l’exercice des médecins dans les quatre pays d’émigration: Etats-Unis, Canada, Grande-Bretagne et Australie.
Les chercheurs ont calculé ce qu’il en coûte pour chaque nation de former un médecin en incluant les sommes dépensées dans le primaire, dans le secondaire et, bien entendu, à la faculté de médecine. Former un médecin varie selon les pays, le moins dispendieux étant l’Ougandais dont le «prix de revient» est d'environ 15.200 euros (10 millions de francs CFA). Le plus cher est le Sud-Africain, avec 43.000 euros (28 millions de francs CFA).

La pénurie de médecin en Afrique du Sud

En cumulant toutes les données, les auteurs de l’étude chiffrent la perte du retour sur investissement liée au départ de ces médecins à plus de 1,5 milliard d'euros (984 milliards F CFA). Au Malawi, cet exil se chiffre à près d'1,6 millions d'euros, mais en Afrique du Sud la facture est de plus d'un milliard d'euros!
Un tiers des médecins formés en Afrique du Sud exerce déjà dans les quatre pays occidentaux. Il y a eu, certes, des départs liés à la politique d’apartheid, mais ce qui est inquiétant c’est que diverses études et sondages indiquent que 58% des personnels de santé travaillant dans le pays disent vouloir émigrer eux aussi vers ces quatre nations occidentales et australes.

L’Afrique du Sud souffre déjà d’un déséquilibre énorme entre zones urbaines et zones rurales, Il y a quatorze fois plus de médecins dans les villes que dans les campagnes. L’épidémie liée au virus du sida nécessiterait, idéalement, trois fois plus de professionnels de santé qu’il n’y en a actuellement. Le désir d’émigration va donc encore aggraver la situation.
Pertes pour le continent africain, mais bénéfices pour les nations d’accueil qui voient arriver des professionnels qui parlent anglais et qui ont bénéficié d’une bonne formation. Il y a même un paradoxe: ces médecins africains ont une expérience de la médecine dite de «premier recours», de proximité que les pays riches ont oubliée.

 

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