mardi 26 juillet 2011

Pourquoi on est sur Facebook, le Brésil sur Orkut, Taïwan sur Plurk

Facebook en France : 20 millions d'utilisateurs actifs. Twitter : 3,3 millions d'utilisateurs dans l'Hexagone. Les deux géants américains du réseau social dominent le paysage internet français. Mais il n'en est pas de même partout. Les exemples de réseaux sociaux « locaux », leaders devant Facebook et Twitter, ne manquent pas : Orkut au Brésil, StudiVZ en Allemagne, Mixi au Japon, hi5 au Portugal…
Pourquoi les internautes de tel pays choisissent-ils un réseau social plutôt qu'un autre ? La question est large, la réponse, très difficile à cerner. Plusieurs facteurs entrent en compte. Selon Antonio Casilli, sociologue et auteur des « Liaisons numériques » (Seuil), le premier d'entre eux est culturel.
« Les réseaux sociaux offrent différents services, qui apparaissent plus ou moins adaptés à la culture du pays. Les internautes auront donc tendance à privilégier un site qui valorisera leurs facteurs culturels. »
Exemple avec Orkut, qu'Antonio Casilli a étudié dans le cadre de son livre. Lancé en 2004 par un étudiant turc, il a rapidement été racheté par Google… et c'est au Brésil qu'il s'est principalement développé. Aujourd'hui, les Brésiliens représentent plus de la moitié des utilisateurs mondiaux du réseau, avec quelque 30 millions de comptes actifs. C'est plus du double de Facebook, qui peine à s'imposer au Brésil.
La base d'Orkut, ce sont les notations de ses amis (et inversement). On note le degré d'amitié. Leur loyauté. Leur beauté. « C'est cette expressivité qui plaît aux Brésiliens », assure Antonio Casilli.

Le « Karma » plaît aux Taïwanais

Le site de micro-blogging Plurk a été créé à Toronto par un Canadien, un Malaisien et un Danois et s'est imposé à Taïwan (difficile de faire plus cosmopolite), avec deux millions d'utilisateurs actifs sur les cinq millions que le réseau compte dans le monde.
Sa spécificité tient au « Karma ». Ce compteur mesure l'activité du Plurkeur, recyclage malin d'un concept 100% asiatique (un bilan sans cesse renouvelé des « bonnes » et « mauvaises » actions d'une vie) dans un pays où le bouddhisme est la première religion. Sur Plurk, un Karma élevé ne donne pas accès au nirvana mais à des fonctionnalités supplémentaires (personnalisation du profil, création d'albums, etc.). Tumi Tu, jeune étudiante taïwanaise, s'enthousiasme de ce principe :
« Plurk est un peu comme un jeu vidéo, dont le but serait d'augmenter son Karma. C'est bien mieux que Twitter ! »
Quant au réseau Mixi, au Japon, et ses 23 millions de membres, le principe de l'anonymat et du pseudonymat sur lequel il est fondé plaît aux internautes nippons. Contrairement à Facebook – et désormais Google +, qui refuse les pseudonymes –, très rares sont ses utilisateurs à afficher leur nom et leur photo sur leur profil. La communication y est à l'image de la société japonaise : implicite. Antonio Casilli :
« Sur Mixi, les échanges sont feutrés, beaucoup moins explicites que sur Facebook. Sur ce dernier, on “aimera” ou commentera un statut pour montrer qu'on est passé par là. Tandis que sur Mixi, un système de traces permet de savoir qui a consulté son profil, pas besoin d'un signe visuel. Et il faut aller voir le profil de l'autre en retour, et ainsi de suite. On garde les éléments de “dignité sociale” très présents dans la société japonaise. »
Les facteurs culturels ne sont pas les seuls à jouer. Il peut aussi s'agir d'une stratégie délibérée de la part d'une marque. C'est par exemple le cas avec Orkut, possédé par Google, qui cherchait avec ce réseau social à concurrencer Facebook dans son pays maternel, les Etats-Unis. En vain. Google a alors davantage ciblé l'Amérique latine. Avec succès cette fois-ci. Aujourd'hui, la marque multicolore tente un nouvel essai avec Google +. Rendez-vous dans un an pour un premier bilan.

« Le problème de l'œuf et de la poule »

Parfois, le côté marketing peut intervenir uniquement après un intérêt manifeste dans un pays. C'est le cas de Plurk, à Taïwan, explique Alvin Woon, le cofondateur malaisien :
« Des blogueurs et des célébrités se sont mis à utiliser le site, de nombreux médias s'y sont intéressés, et la machine était lancée. Nous avons commencé à organiser des conférences, des événements, etc. Nous avons reçu ici l'attention dont nous avions besoin. »

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